La confirmation de la deuxième saison de « Agatha All Along » marque un tournant dans la manière dont Marvel Television entend consolider son univers magique au sein du petit écran. La première apparition d’Agatha Harkness dans « WandaVision » avait déjà attiré l’attention par sa subtilité narrative et l’interprétation remarquée de Kathryn Hahn. La série spin-off, qui lui a ensuite été consacrée, a confirmé le potentiel d’un personnage longtemps resté en marge de l’action principale du Marvel Cinematic Universe. Aujourd’hui, son retour pour une nouvelle saison ne relève pas d’une simple suite, mais d’un choix de construction plus ambitieuse.
La saison deux devrait reprendre exactement où la première s’est arrêtée, dévoilant peu à peu les ramifications personnelles, symboliques et mystiques des choix d’Agatha. Loin de l’archétype de la sorcière ironique et toute-puissante, la protagoniste est traitée avec des nuances plus profondes, explorant son passé, ses regrets et ses motivations. Le scénario reste confié aux sœurs Zuckerman, garantes d’une continuité stylistique et thématique avec le premier cycle. Cela garantit une cohérence narrative précieuse, d’autant plus dans un univers aussi interconnecté que celui de Marvel.
D’après les premières fuites, la nouvelle intrigue prévoit un déplacement de l’attention vers les conflits internes et la façon dont le pouvoir agit sur la construction de l’identité. Agatha ne sera pas la seule figure centrale ; deux nouveaux personnages liés à des traditions magiques différentes viendront questionner les certitudes, créant des tensions narratives basées non pas sur la confrontation directe, mais sur des divergences de perception et de méthode. Cette orientation ouvre la porte à une exploration thématique plus complexe, où le surnaturel n’est pas qu’un ressort spectaculaire mais devient l’expression de trajectoires individuelles contradictoires.
Le dispositif visuel de la série pourrait aussi évoluer de manière significative. Si la première saison jouait avec les codes des sitcoms américaines, cette suite semble s’orienter vers une esthétique plus introspective, s’inspirant des codes de l’occultisme cinématographique. La photographie pourrait devenir plus sobre, les décors plus épurés, centrés sur la manière dont les lieux influencent la psychologie des personnages. On murmure que Chloé Zhao pourrait réaliser certains épisodes, ce qui conférerait à la série une touche contemplative, où la magie serait montrée moins comme un art visuel que comme un langage intime et organique.
Par ailleurs, l’absence annoncée de Wanda Maximoff, bien que remarquée, ne devrait pas éclipser la richesse potentielle du récit. Les références indirectes au multivers et à Doctor Strange pourraient situer la saison dans un contexte plus vaste, sans pour autant détourner l’attention de ce qui fait le cœur du projet : la construction lente et subtile d’une identité magique singulière, à travers des relations, des ruptures, et des choix éthiques ambigus.
Ce parti pris se retrouve aussi dans le jeu d’acteurs. Kathryn Hahn, toujours au centre de l’attention, continue de nuancer son personnage, naviguant entre cynisme et désillusion, pouvoir et solitude. L’écriture, davantage portée sur les dialogues intimes que sur les grandes tirades explicatives, renforce cette ambiance de tension diffuse où les enjeux se dessinent davantage dans les silences et les détours que dans les affrontements ouverts.
Avec cette deuxième saison, Marvel semble vouloir affirmer une stratégie différenciée dans son univers sériel. En se concentrant sur des figures en marge des récits traditionnels, la firme explore une autre façon de raconter : plus lente, plus intimiste, moins orientée vers l’effet et plus vers la construction progressive de personnages complexes. Ce choix pourrait bien représenter l’avenir du MCU télévisé, un terrain d’expérimentation où les règles sont plus souples et les attentes plus ouvertes.
Ce qui se dessine donc avec « Agatha All Along », ce n’est pas uniquement la suite d’un spin-off populaire, mais la tentative de créer un espace à part, où l’héritage des super-héros cède la place à des figures moins lisses, plus ancrées dans des tensions intérieures, et porteuses d’un regard différent sur le monde qui les entoure.
Dans un contexte où l’offre sérielle s’accroît chaque année, le succès de cette approche reposera sur la capacité à maintenir une exigence élevée sur le plan éditorial, tout en évitant les facilitation narratives ou les recettes trop balisées. Si la deuxième saison confirme cette ambition, « Agatha All Along » pourrait bien s’imposer comme l’une des propositions les plus audacieuses et raffinées de l’univers Marvel.